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Mémoire sur la loi sur l’accessibilité présenté au Gouvernement du Canada (Emploi et Développement social Canada) par l’Alliance de la Fonction publique du Canada

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Le 27 février 2017

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Introduction

L’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) accueille favorablement l’occasion qui lui est donnée d’offrir ses commentaires sur l’élaboration d’une nouvelle loi sur l’accessibilité destinée à éliminer les obstacles que rencontrent les personnes ayant un handicap, dans le but de favoriser leur participation pleine et entière à la société.

Avec ses quelque 180 000 membres, l’AFPC est le plus grand syndicat de fonctionnaires au Canada. Notre organisation, qui se caractérise notamment par sa diversité, représente non seulement des employés fédéraux, mais aussi des travailleuses et travailleurs d’autres secteurs publics et du secteur privé dans tout le pays.

Nous croyons fermement qu’il faut offrir à tous les membres de la société, dont les personnes ayant un handicap, la chance de participer activement à toutes les sphères de la vie sociale, y compris le travail. La majorité de nos membres évoluent dans la fonction publique fédérale. Par conséquent, nos commentaires porteront sur les questions qui les touchent, ainsi que les personnes qui aspirent peut-être à travailler dans ce secteur.

Nous avons cerné quatre grands sujets de préoccupation :

  1. L’équité en matière d’emploi
  2. L’adaptation
  3. La cessation d’emploi en raison d’une invalidité
  4. La dotation

L’équité en matière d’emploi

L’équité en matière d’emploi constitue une stratégie incontournable pour qui veut éliminer les obstacles et améliorer l’accès des personnes ayant un handicap. À l’heure actuelle, les travailleuses et travailleurs de compétence fédérale sont assujettis à la Loi sur l’équité en matière d’emploi (LEE). Cette loi s’applique à l’administration et aux organismes fédéraux, aux sociétés d’État ainsi qu’aux secteurs de ressort fédéral. Elle s’applique aussi à une partie des entrepreneurs qui obtiennent des contrats fédéraux.

Bien que l’adoption de la loi sur l’équité remonte à plus de vingt ans, les personnes ayant un handicap continuent de rencontrer un certain nombre d’obstacles dans la fonction publique fédérale.

Pour donner un exemple, le Rapport annuel sur l’équité en matière d’emploi 2014-2015 du Conseil du Trésor laisse entrevoir une tendance préoccupante. On y apprend que les personnes ayant un handicap sont presque trois fois plus nombreuses à quitter la fonction publique que celles qui y accèdent. Comment expliquer ces départs? Les données recueillies dans le cadre du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux de 2014 peuvent nous fournir quelques éléments de réponse.

On constate, chez les fonctionnaires ayant un handicap, un taux de réponses négatives sensiblement plus élevé à certaines questions, notamment à celles qui portent sur l’accès au matériel et à l’équipement nécessaire pour remplir ses fonctions; sur l’accès à la formation et aux ressources requises pour garantir sa santé et sa sécurité au travail; et sur le fait de voir ou non son travail reconnu lorsqu’il est bien fait.

Toujours selon les résultats du sondage, les travailleuses et travailleurs ayant un handicap auraient davantage de difficulté que les autres à se faire accepter au travail comme membre à part entière de « l’équipe » ou à être sélectionnés pour un poste. Par ailleurs, ils étaient presque deux fois plus nombreux à avoir subi du harcèlement au travail au cours des deux années précédentes.

Enfin, le cadre législatif actuel présente un certain nombre de problèmes auxquels il faudrait remédier pour parvenir à améliorer le taux d’emploi des personnes ayant un handicap au sein de la fonction publique fédérale. La loi actuelle ne couvre pas un champ assez large et de nombreux travailleuses et travailleurs sont laissés pour compte. Enfin, il existe peu de mécanismes pour en faire respecter les dispositions ou imposer une reddition de comptes.

Recommandations de l’AFPC sur l’équité en matière d’emploi

1. Procéder à un examen législatif de la Loi sur l’équité en matière d’emploi

Depuis son adoption en 2002, la Loi sur l’équité en matière d’emploi n’a jamais fait l’objet d’un examen législatif complet même si elle en prévoit un tous les cinq ans. Le moment venu, il faudra tenir des consultations approfondies auprès de toutes les parties intéressées, y compris les personnes ayant un handicap et les agents négociateurs.

2. Élargir le champ d’application de la Loi sur l’équité en matière d’emploi

La Loi sur l’équité en matière d’emploi devrait s’appliquer au Sénat, à la Chambre des communes et à la Bibliothèque du Parlement. Elle devrait également s’étendre aux Forces armées canadiennes et à la GRC (civils et officiers). Tous ces employeurs en sont exemptés à l’heure actuelle. Cela signifie qu’ils ne sont pas tenus de créer des milieux de travail représentatifs ni d’éliminer les obstacles susceptibles de se présenter pour les personnes ayant un handicap.

3. Modifier la Loi sur l’équité en matière d’emploi afin d’y incorporer des mécanismes de reddition des comptes et d’exécution.

La loi actuelle n’oblige pas les employeurs à rendre des comptes. Par conséquent, il n’existe aucun moyen de vérifier s’ils satisfont à leurs obligations. Ces lacunes en matière de surveillance et de responsabilité ont d’ailleurs été relevées par le dans ses rapports sur l’équité en emploi.

La délégation des pouvoirs aux administrateurs fédéraux par le Conseil du Trésor a conduit à une application inégale de la loi. Si l’on étudie les chiffres d’un peu plus près, on constate que le taux de représentation des personnes ayant un handicap demeure constant. Or ces dernières quittent la fonction publique à un rythme qui surpasse leur taux de représentation et le taux d’embauche dans ce groupe d’équité. Malgré tout, peu de mesures ont été prises pour corriger ce problème puisque, globalement, il y a peu ou pas de « déficit de représentation ». L’une des raisons de cette inaction réside dans le fait que le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) et la Commission de la fonction publique (CSF) ont délégué leurs pouvoirs aux ministères. Ils ne peuvent plus, par conséquent, exiger que les ministères prennent les mesures qui s’imposent à cet égard. Il ne leur est pas possible non plus de faire un suivi assorti de mesures conséquentes en cas d’inertie.

L’AFPC recommande en particulier l’adoption des mesures suivantes.

  1. Le Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique doivent exiger des comptes des ministères, suivre leurs progrès et mettre en place les ressources nécessaires afin d’éliminer les obstacles auxquels se butent les personnes ayant un handicap.
  2. La politique du Conseil du Trésor sur l’équité en emploi doit établir des orientations précises et des mécanismes de reddition des comptes s’adressant aux ministères.
  3. Il faut adopter en matière de droits de la personne des politiques vigoureuses, efficaces et opportunes sur des questions comme l’adaptation, le télétravail et le harcèlement, assorties de conséquences sérieuses en cas de non-conformité. On constate actuellement une tendance à délaisser les politiques distinctes et à les amalgamer à des politiques générales, qui sont des instruments beaucoup moins efficaces.
  4. Il faut rendre obligatoires les comités mixtes sur l’équité en matière d’emploi et permettre aux syndicats de porter à leur attention les obstacles rencontrés par les personnes ayant un handicap en vue d’y remédier. Actuellement, peu de ces comités sont en place. Et lorsqu’ils existent, ils ne fonctionnent pas bien ou ne procèdent pas à de véritables consultations.
  5. Il faut instaurer un mécanisme permettant aux syndicats, lorsque survient un problème dans un lieu de travail, de déposer une plainte pour violation des droits de la personne qui donnerait lieu à une vérification de conformité. Les données figurant dans les plans sur l’équité en matière d’emploi ou d’autres données pertinentes pourraient servir de fondement. À l’heure actuelle, la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP) comporte un certain nombre d’obstacles qui nous empêchent de le faire. Un mécanisme de plainte existe, mais il s’inscrit dans la démarche de vérification de la conformité. À notre avis, son efficacité n’a pas été démontrée.
  6. La Commission canadienne des droits de la personne doit tenir des vérifications régulières et exhaustives chez tous les employeurs régis par la Loi, préférablement tous les un à trois ans. La démarche a été modifiée au cours des années; le nombre de vérifications a baissé et l’on a eu tendance à les « simplifier », si bien que les exigences en matière de reddition de comptes ont diminué.

4. Il faut renforcer le Programme de contrats fédéraux.

Le gouvernement précédent a opéré des changements qui ont affaibli le Programme de contrats fédéraux (PCF). En 2013, il a rehaussé le seuil de couverture de telle façon que le nombre d’employeurs assujettis au PCF est passé de 1000 à un peu plus de 600.

De plus, les exigences en matière d’équité en emploi ont été réduites considérablement. En effet, les entreprises ne sont plus tenues de remplir un certain nombre de conditions : mettre en place un mécanisme de reddition des comptes; consulter les agents négociateurs et les représentants des employés et collaborer avec eux; instaurer des mesures pour éliminer les obstacles; adopter des solutions raisonnables en matière d’adaptation et des mécanismes de suivi; réviser et mettre à jour les plans d’équité en matière d’emploi.

Par ailleurs, les entrepreneurs se sont plus tenus de rendre compte des mesures de conformité qu’ils ont adoptées si on les sélectionne pour un contrat. Il leur suffit désormais de présenter une analyse de leur effectif ainsi que leurs objectifs en matière de représentation, et ce, un an après avoir décroché leur premier contrat.

Enfin, les vérificateurs de l’équité en matière d’emploi du ministère de l’Emploi et du Développement social (autrefois RHDCC) ont été mis à pied, si bien qu’il n’y a presque plus personne pour procéder à des vérifications en bonne et due forme.

Tous ces changements constituent un recul sur le plan de l’équité en emploi et de l’intégration des personnes ayant un handicap. Le Programme de contrats fédéraux devrait être rétabli et renforcé.

L’AFPC recommande en particulier l’adoption des mesures suivantes.

  • Le gouvernement doit rétablir le seuil de couverture des entreprises régies par le programme, soit les employeurs qui obtiennent des contrats dépassant les 200 000 $.
  • Les exigences doivent être identiques à celles qu’on impose aux employeurs régis par la Loi sur l’équité en matière d’emploi. Ces changements permettront d’accroître les débouchés offerts aux personnes ayant un handicap et de remédier aux obstacles.
  • Il faut procéder à des vérifications pour veiller à ce que les employeurs respectent la loi.

5. La Commission canadienne des droits de la personne doit se doter du personnel nécessaire pour mener les vérifications régulières prévues aux termes de la Loi sur l’équité en matière d’emploi.

La Commission canadienne des droits de la personne manque depuis plusieurs années de ressources en matière de budget et de personnel. Il ne lui est pas possible, dans ces conditions, de procéder régulièrement à des vérifications. Elle s’est tournée vers l’autoréglementation des employeurs, plutôt que de les obliger à rendre compte des méthodes mises en place pour satisfaire aux exigences de la loi.

L’AFPC recommande l’adoption de la mesure suivante.

  • Le gouvernement fédéral doit accorder à la Commission canadienne des droits de la personne un financement suffisant pour être en mesure de soumettre tous les employeurs régis par la Loi sur l’équité en matière d’emploià des vérifications régulières (tous les un à trois ans).

6. Le gouvernement fédéral doit mettre en œuvre l’ensemble des recommandations formulées par le Comité sénatorial permanent des droits de la personne dans ses rapports sur l’équité en matière d’emploi.

Le se penche depuis un certain nombre d’années déjà sur la question de l’équité en emploi et les obstacles rencontrés par les quatre groupes désignés. Il a interrogé un grand nombre de témoins. Ses rapports contiennent des recommandations très importantes. Plutôt que de les répéter ici, nous nous contenterons d’inviter les personnes chargées d’élaborer la loi sur l’accessibilité à en prendre connaissance, car elles n’ont rien perdu de leur pertinence.

L’équité en matière d’emploi dans la fonction publique fédérale : vigilance et égalité vont de pair

(décembre 2013)

Refléter le nouveau visage du Canada : l’équité en matière d’emploi dans la fonction publique

(juin 2010)

L’équité en matière d’emploi dans la fonction publique fédérale : nous n’y sommes pas encore (février 2007)

L’adaptation

Malgré la protection offerte par les lois sur les droits de la personne et les décisions marquantes de la Cour suprême du Canada à cet égard, l’accessibilité des lieux de travail continue d’être un sujet de préoccupation majeur pour les travailleuses et travailleurs ayant un handicap.

En effet, on continue de refuser des mesures d’adaptation aux fonctionnaires qui ont un handicap reconnu ou retournent au travail avec un handicap. Cette situation s’explique en partie par un problème d’attitude, ainsi que par un manque de compréhension et d’expérience. Dans une société qui exige une productivité accrue, les personnes ayant un handicap sont parfois perçues comme un frein. Lorsque les primes et les évaluations reposent sur des objectifs de productivité, il peut arriver que les gestionnaires et l’entourage de travail aient un préjugé défavorable envers les personnes qui ont besoin d’aménagements particuliers ou doivent « travailler autrement », craignant que cela puisse avoir une incidence sur le rendement.

Les personnes qui demandent des mesures d’adaptation pour des raisons de santé mentale continuent d’être victimes de stigmatisation. Elles sont souvent l’objet de remarques qui ridiculisent leur problème ou en minimisent la portée. Elles ont alors le sentiment que leur demande d’adaptation ne sera pas prise au sérieux. Les personnes qui ont un handicap physique affrontent elles aussi des situations du même genre.

Soulignons que les plaintes et les griefs pour violation des droits de la personne qui portent sur l’adaptation peuvent souvent prendre des années avant de trouver un dénouement. Cet état de choses multiplie les problèmes pour les personnes à la recherche d’une solution opportune et peut même contribuer à empirer leur état.

Recommandations de l’AFPC sur l’adaptation

  1. Établir une grille d’évaluation axée sur les besoins des personnes ayant un handicap, analogue à l’analyse différenciée entre les sexes. Cette grille devrait être appliquée à l’ensemble des politiques, projets de loi et de règlements, programmes, services, pratiques et normes et servir à déterminer leur incidence sur les principaux intéressés. Pour donner un exemple, les changements apportés par le Conseil du Trésor à sa politique sur le stationnement n’ont pas tenu compte des conséquences pour les personnes ayant un handicap. Chacune d’elles a dû s’en remettre à la décision de son gestionnaire. Un autre exemple est la mise en œuvre de la stratégie Milieu de travail 2.0. Ici encore, on n’a pas réfléchi à ses répercussions sur les personnes qui ont des difficultés d’apprentissage, une déficience auditive, un TDAH ou une incapacité d’un autre type.
  2. Le Conseil du Trésor doit jouer un rôle actif en matière de suivi et veiller à ce que les ministères rendent des comptes et aient les moyens de régler les problèmes d’adaptation lorsqu’ils se présentent.
  3. Établir un fonds centralisé dédié à l’adaptation de façon à ce que les gestionnaires n’aient pas l’impression que les mesures grèveront leur budget, même si, en réalité, la plupart des demandes se traduisent par un coût inférieur à 500 $. Plusieurs mois peuvent s’écouler avant la livraison de matériel comme un logiciel ou un ordinateur adapté. Cette attente peut entraîner un risque accru de blessure pour la personne concernée.
  4. Offrir aux gestionnaires une formation continue obligatoire sur l’adaptation. Nous ne parlons pas ici de formation en ligne ni d’atelier de trois heures sur le sujet, car ces moyens n’ont pas d’effet déterminant sur les perceptions et les préjugés. Toute formation doit viser à ce que les gestionnaires adhèrent à l’idée que l’adaptation fait partie intégrante de leurs activités en matière de « gestion » de l’effectif.
  5. Donner des directives claires sur la quantité d’information médicale suffisante pour appuyer une demande d’adaptation. On demande fréquemment aux principaux intéressés de fournir à l’employeur des renseignements additionnels, même si l’information médicale au dossier précise bel et bien la nature des limitations ou de l’incapacité. Ces demandes constantes ne font que prolonger la démarche d’adaptation. Elles peuvent s’avérer épuisantes pour les membres obligés de payer afin d’obtenir l’information requise tout en ne sachant pas très bien expliquer au médecin ce qu’on exige d’eux. Il arrive que l’employeur finisse par demander une évaluation médicale indépendante afin de clarifier les besoins de la personne, ce qui retarde encore davantage le processus. L’employé ou son syndicat se voient alors obligés de faire valoir le caractère exceptionnel de la requête et d’argumenter que les données déjà au dossier sont suffisantes.
  6. Recenser les demandes de mesures d’adaptation et répertorier des données sur les éléments suivants : le nombre de demandes initiales; le nombre de dossiers résolus et non résolus; le temps écoulé avant d’aboutir à une solution; le nombre de personnes qui quittent un lieu de travail à cause d’un refus et la formule qu’elles choisissent (congé sans solde, retraite pour cause de maladie, etc.); les lieux de travail concernés (adresse, ministère et fonction publique générale). Cette information permettra de dégager des tendances et de déterminer où se situent les obstacles.
  7. Mener des entrevues de fin d’emploi, notamment avec les personnes ayant un handicap, afin de savoir si leur départ est attribuable à l’absence de mesures d’adaptation ou à d’autres raisons liées à leur handicap.

Cessation d’emploi pour cause d’invalidité signifiée par le Conseil du Trésor

Depuis 1997, le Conseil du Trésor autorise les ministères à faire parvenir aux employés en congé non payé une lettre qui leur ordonne de retourner au travail ou de mettre fin à leur relation d’emploi avec le gouvernement fédéral. Dans presque tous les cas, ces missives s’adressent à des fonctionnaires en congé depuis un an ou plus en raison d’une invalidité. Un grand nombre des destinataires combattent une maladie chronique.

La Directive sur les congés et les modalités de travail spéciales de 2009 accorde au Conseil du Trésor le pouvoir de procéder à une évaluation des fonctionnaires en congé non payé. Elle autorise les ministères et les organismes fédéraux à licencier une employée ou un employé qui bénéficie de l’assurance invalidité depuis deux ans. Dans certains cas, la cessation d’emploi survient avant que cette période ne soit écoulée.

Voici un extrait de l’Annexe sur les congés non payés qui accompagne la directive.

2.2 Maladie ou blessure survenue au travail

La personne ayant le pouvoir délégué requis doit envisager d’accorder un congé non payé à la personne nommée à l’administration publique centrale qui ne peut travailler pour cause de maladie ou blessure survenue au travail et qui a épuisé ses crédits de congé de maladie ou de congé d’accident de travail.

À des fins relatives à l’administration et aux avantages sociaux seulement, ce type de congé constitue un congé de maladie non payé et est enregistré à ce titre.

S’il est clair que la personne ne sera pas en mesure de retourner au travail dans un avenir prévisible, la personne ayant le pouvoir délégué doit envisager d’accorder un congé non payé d’une durée suffisante pour permettre à cette personne de prendre les dispositions nécessaires en prévision de sa cessation d’emploi de l’administration publique centrale pour raisons médicales.

Si la personne ayant le pouvoir délégué est convaincue qu’il y a de fortes chances que la personne retourne au travail dans un délai raisonnable (dont la durée variera selon les circonstances), un congé non payé peut être considéré afin qu’il n’y ait pas d’interruption d’emploi. Les modalités applicables à la période de congé non payé doivent être suffisamment souples pour permettre à la personne ayant le pouvoir délégué de tenir compte des besoins d’une personne ayant des problèmes particuliers de réadaptation, y compris des mesures de recyclage.

La personne ayant le pouvoir délégué doit réexaminer chaque cas périodiquement afin de s’assurer que le congé non payé accordé pour maladie ou blessure survenue au travail n’est pas prolongé sans raison médicale valable. Les cas de congé non payé doivent être réglés dans les deux ans qui suivent la date du début du congé, quoique chaque cas doit être évalué sous réserve de ses circonstances particulières.

Le congé non payé accordé pour maladie ou blessure survenue au travail se termine lorsque la personne :

  • retourne au travail;
  • démissionne ou prend sa retraite pour des raisons médicales;
  • perd sa qualité de fonctionnaire aux termes de l’article 42 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique;
  • est licenciée pour des raisons autres qu’un manquement à la discipline, conformément à la Loi sur la gestion des finances publiques.

Il arrive ainsi qu’on offre aux employés en congé non payé la possibilité de « choisir » entre la démission, le congédiement ou la retraite pour cause de maladie. Des organismes comme l’Agence du revenu du Canada et l’Agence canadienne d’inspection des aliments ont imité cette façon de faire.

Même si, à première vue, cette politique semble accorder aux employés le droit de décider librement de mettre fin à la relation d’emploi, dans les faits, on les pousse souvent à partir. Certains redoutent que ces départs forcés ne visent des travailleuses et travailleurs handicapés vulnérables. N’oublions pas que le fait pour une personne de quitter la fonction publique a des répercussions directes sur ses prestations sociales et de retraite.

Par suite d’un règlement sur cette question, le Conseil du Trésor a publié un bulletin d’information visant à dissiper toute confusion quant à l’approche à privilégier dans les cas de congé non payé attribuable à une maladie ou à une blessure. En voici un extrait :

                 Comme l’indique la Directive, la période de congé non payé pour maladie ou blessure doit être assez souple pour permettre à l’autorité chargée d’administrer les congés de répondre aux besoins d’un employé ayant des problèmes particuliers de réadaptation. Les congés non payés devraient être accordés et prolongés au cas par cas en fonction des circonstances individuelles. Lorsque des indices montrent que l’employé devrait pouvoir reprendre le travail dans un avenir prévisible, il faut tenir compte du concept de souplesse et du devoir de prendre des mesures d’adaptation.

      Le délai de deux ans mentionné dans la Directive est un repère ou point de référence qui permet de veiller à ce qu’un examen soit effectué afin de déterminer si la période de congé non payé correspond et convient à la situation de l’employé en cause. Ce délai de deux ans constitue non pas une limite, mais plutôt un élément déclencheur qui permet d’assurer qu’un examen et une évaluation approfondie du dossier de l’employé sont effectués. Le congé non payé peut se prolonger au-delà du délai de deux ans ; toutefois, la direction doit être d’avis que cette prolongation est justifiée, c’est-à-dire que l’employé demeure incapable de reprendre le travail, mais que l’on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’il soit en mesure de le faire dans un avenir prévisible (c’est nous qui soulignons).

Il est important de préciser que, selon la jurisprudence, l’employeur n’est pas tenu de garder une employée ou un employé indéfiniment si le retour au travail n’est pas envisageable dans un avenir prévisible.

En dépit du bulletin précité, l’AFPC continue de contester la pratique consistant à congédier automatiquement les employés en congé non payé pour invalidité. Dans certaines circonstances, la personne peut nécessiter un congé de deux ans ou plus avant d’être en mesure de retourner au travail avec des mesures d’adaptation adéquates, selon la nature de son invalidité. Chaque cas doit être évalué en fonction de ses faits particuliers.

Recommandations de l’AFPC sur la cessation d’emploi relative à une invalidité

  • Réviser la Directive sur les congés et les modalités de travail spéciales afin d’éliminer tous les obstacles pour les personnes ayant un handicap, y compris la période pendant laquelle un employé qui est en congé non payé en raison d’une invalidité peut conserver sa qualité de fonctionnaire.

Dotation

Tout véritable plan d’action concernant la représentation des personnes ayant un handicap au sein de la fonction publique doit comporter un examen des lois et des processus en matière de dotation. La Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP) a été modifiée en 2003 et mise en œuvre partiellement en 2005. Même si ce nouveau régime législatif offrait en apparence davantage de recours qu’auparavant, l’expérience nous enseigne que c’est loin d’être le cas.

Le régime de dotation actuel est dépourvu de mécanismes efficaces en matière de reddition de comptes et de recours. Même si l’ancien système des comités d’appel n’était pas parfait, il offrait l’avantage d’une tierce partie indépendante chargée d’étudier la portée des erreurs, des irrégularités et des omissions dans le processus de sélection; de plus, il était informel et facile d’accès. Ce sont là des caractéristiques que l’on ne retrouve plus dans le régime actuel.

Les modifications à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique ont eu pour conséquence de limiter les voies de recours. À titre d’exemple, une employée ou un employé ne peut être nommé dans un poste lorsque sa plainte est accueillie. De plus, il arrive rarement qu’on donne suite à une plainte déposée pour un motif lié au handicap ou à l’absence d’adaptation pendant un processus de dotation.

L’AFPC a relevé des motifs de préoccupation dans les domaines suivants.

Le recrutement

La question du recrutement est soulevée par la Commission de la fonction publique (CSP) dans son Rapport annuel 2015-2016 :

LaCFPa réalisé une étude quantitative intitulée Candidature et nomination des personnes handicapées dans la fonction publique. Les résultats ont montré qu’au cours des 10 dernières années, la représentation des personnes handicapées au sein de la fonction publique est demeurée stable, surpassant chaque année leur taux de disponibilité dans la population active.

Toutefois, le pourcentage de personnes handicapées qui postulent à la fonction publique et qui y sont nommées est demeuré sous leur niveau global de disponibilité dans la population active. Cette différence s’explique en partie par le nombre disproportionné de recrues qui déclarent leur handicap quelques années après leur nomination, ce qui fait augmenter la représentation des personnes handicapées à la fonction publique. Ces données indiquent également que certaines personnes craignent de déclarer leur handicap au moment de leur embauche.

Le principe du mérite

La notion de mérite est moins équitable et son application systématiquement plus arbitraire qu’avant la modification de la LEFP. Une nomination est fondée sur le mérite lorsqu’on juge qu’une personne possède les qualifications requises, aujourd’hui et à l’avenir, pour occuper un poste établies par l’administrateur général du ministère. Cela permet une très grande latitude en matière de dotation. Le ministère n’est pas tenu d’embaucher la personne la plus qualifiée, seulement celle qu’il juge être la meilleure parmi les candidats.

Voici un exemple. Un ministère à court d’argent qui se voit obligé d’embaucher quelqu’un, peut-être pour atteindre des objectifs de rendement irréalistes, sera moins enclin à embaucher une personne ayant un handicap, estimant qu’elle pourrait lui coûter plus cher à cause des mesures d’adaptation ou ne pas être en mesure de remplir les objectifs fixés. On accorderait alors peu de poids aux « lignes directrices » de la Commission de la fonction publique à l’égard de milieux de travail sans obstacles.

Au cours de l’examen stratégique et fonctionnel réalisé par le gouvernement précédent (connu aussi sous le nom de Plan d’action pour la réduction du déficit), le principe du mérite relatif a été utilisé de façon arbitraire, sans les restrictions et les recours qui s’appliquaient avant l’adoption de la Loi sur la modernisation de la fonction publique. Bien qu’on puisse tenir pour acquis que la majorité des fonctionnaires, dont les gestionnaires, ne contournent pas délibérément le processus de dotation, on peut supposer que certains le font. Lorsque c’est le cas, malheureusement, on ne peut pas faire grand-chose.

La précarité d’emploi

La précarité d’emploi constitue un autre obstacle pour les personnes ayant un handicap. Les statistiques récentes montrent une forte augmentation de l’emploi précaire dans la fonction publique fédérale. Le directeur parlementaire du budget (DPB) et la Commission de la fonction publique arrivent au même constat.

Globalement, les dépenses de rémunération ont diminué de 1,3 % comparativement à l’an dernier, c’est-à-dire 120 millions de dollars. Selon le DPB, cette baisse s’explique par l’augmentation du nombre d’emplois précaires.

En effet, le nombre de postes à temps plein a diminué, alors que le nombre de postes à statut précaire a augmenté. Toujours selon le DPB, le nombre de postes à durée déterminée a augmenté de 9,3 %, le nombre de postes occasionnels de 8,3 % et le nombre d’emplois d’étudiants de 6,0 %[1]

Si l’on examine les activités d’embauche, la Commission de la fonction publique rapportait en 2015-2016 que le gouvernement avait recruté au total 4533 personnes dans des postes à durée indéterminée, sans tenir compte des départs et des retraites. Durant la même période, 32 370 personnes ont été recrutées pour occuper un poste à durée déterminée, occasionnel ou d’étudiant[2].

Ce que ces chiffres ne disent pas, c’est qu’on a recours de plus en plus fréquemment à des employés contractuels embauchés par l’intermédiaire d’agences de recrutement de travailleurs temporaires. Le poste budgétaire consacré aux services professionnels est estimé à 10,9 milliards de dollars pour l’année financière 2016-2017, ce qui nous donne une idée des prévisions en matière de dépenses dans cette catégorie d’emplois. Lorsqu’on leur a demandé de faire rapport sur le recours aux contractuels, la plupart des ministères ont répondu qu’ils « ne recueillaient pas ce type d’information »[3].

Enfin, une nouvelle politique de la CSP est entrée en vigueur l’an dernier qui délègue davantage de pouvoirs en matière de dotation. Elle suscite de nouvelles inquiétudes quant au « pouvoir discrétionnaire » des gestionnaires dans les processus d’embauche.

Recommandations de l’AFPC sur la dotation

  1. Procéder à l’examen des processus et des lois en matière de dotation et de recours en vue de cerner les obstacles éventuels pour les personnes ayant un handicap.
  2. Accorder à la Commission de la fonction publique un plus grand rôle en matière de surveillance et de reddition des comptes.

 

Conclusion

Le gouvernement fédéral a aujourd’hui l’occasion d’éliminer les obstacles à l’accessibilité et à l’intégration des personnes ayant un handicap au sein de la fonction publique. Il a le pouvoir d’améliorer les lois, les processus et les politiques en place de façon à ce qu’ils servent de modèles pour tous les employeurs du secteur public.

L’AFPC est prête à collaborer avec le gouvernement à la mise en œuvre des changements nécessaires.

--------------

 
[1] Directeur parlementaire du budget, Suivi des dépenses : premier trimestre 2016-2017, chapitre 2.1 (Fonctionnement), p. 7-8.
[2]Rapport annuel de la Commission de la fonction publique 2015-2016, p.10.
[3] Ordre/adresse de la Chambre des communes no Q-89 de Mme Finley (Haldimand-Norfolk), 7 avril 2016.
 
French

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Publication Date: 
Thursday, May 11, 2017 - 10:30am

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